À l'avant d'une imposante voiture nord-américaine, je déguste un bagel à la crème, accompagné par un café. Après près de huit heures de vol, amplifiée par deux heures de retard, et une d'attente à la douane -ce à quoi il faut ajouter le décalage horaire- voilà une boisson permettant de garder le rythme. Quoi qu’il en soit, je suis bien arrivé sur le sol canadien. Derrière le pare-brise, la skyline de Toronto prend doucement forme.
S’il est plus de 19h officiellement dans les rues de Toronto, mon esprit est toujours à l'heure de l'hexagone. Dans la capitale, la pendule avance de six heures. Alors qu'un jour nouveau commence en France, ma journée approche lentement de son crépuscule. Bien installé dans le véhicule, mes hôtes me conduisent vers ma demeure provisoire.
précédemment dans Fly Me To The North
Une musique aux accents rock ambiance le trajet, alors que j’observe les alentours. Aucune voiture française ne semble rouler sur le sol ontarien. Quelques allemandes, mais une majorité de véhicules japonais et américains. Ce n'est peut-être qu'une impression, mais de ce côté, tout semble aller plus vite. Quelque cinquante minutes plus tard, je peux prendre une douche, avant de retrouver les bras de Morphée.
Le ciel ne m'aura pas accordé beaucoup de temps d'adaptation. Après un jour complet dans la ville, le climat nous tombe sur la tête. En une soirée, le paysage est totalement chamboulé. Le blizzard n'obéit à personne, et la neige prend furtivement le dessus sur les installations humaines.
Mon émerveillement pour ces conditions, déjà conté ici, apparaît bien en contraste avec la réaction des habitants. Devant leurs habitations, chacun s'attelle à dégager des chemins. Une vision plus pragmatique de la neige. Cette dernière ne quittera pas le décors avant les premiers jours d'avril.
La fonte des neiges, pareil à la clôture d’un chapitre, m'a semblé bien triste. La froideur des alentours m'était devenue bien familière en l’espace de quelques semaines. Cependant, la fleuraison des bourgeons, accompagné des multiples chants d'oiseau, m'a rapidement conquis.
En opposition aux villes françaises, la vie animale ne se cache pas, semblant ne pas être inquiétée par les va-et-vient des humains. Du moins, les différents animaux étaient acteurs à temps plein de la vie de mon quartier.
À une trentaine de minutes en transports des gratte-ciel, il n'est pas rare de croiser des écureuils, des multiples oiseaux, voire des ratons laveurs. C’est même plutôt l'inverse. Cardinaux rouges, carouges à épaulettes, ou autres merles d'Amérique, pics flamboyants, buses et éperviers... il y en avait pour les yeux, et les oreilles.
Si je n'ai pas eu la chance de pouvoir observer de raton laveur en activité (à la différence d'un ami, vivant pourtant dans le centre-ville), j'ai eu -pour L'Express de Toronto- la possibilité de suivre une entreprise spécialisée dans la prise en charge de ces animaux pendant une journée. Un reportage en immersion qui m'a beaucoup enchanté, et permis de découvrir l’ouest du Grand Toronto.
Bien sûr, tuer des animaux retrouvés sur des propriétés humaines est hors de question. Tout d'abord, c'est interdit. Surtout, ce n'est pas nécessaire, ces animaux cherchent juste à faire leur vie. Comme nous. Alors, quand ils récupèrent une famille de ratons laveurs par exemple, ils déplacent le petit groupe dans un autre lieu, tout en ne dépassant pas un kilomètre du précédent initial. Il ne faudrait pas qu'ils perdent leurs repères, ce qui serait synonyme de mort imminente.
Dans mon esprit, il était difficile de ne pas associer l'Amérique du Nord d’une gargantuesque consommation de viande. C'est alors avec plaisir que j'ai visité les rayons végétariens/vegans des supermarchés. Saucisses végétales, nuggets, bacons, steaks ou encore de quoi faire une sauce bolognese sans tuer d'animaux... une grande variété, appétissante, et moins chère que la viande.
Suivre un régime végétarien, voire vegan, est de plus en plus possible, accessible. Cela ne se résume pas à manger des salades ou des graines. Si les Canadiens y arrivent très bien, rien ne vous empêche d'essayer!
Plus globalement, pendant ces quatre mois de séjour au Canada, j'ai eu plaisir à me promener dans les différents espaces verts et naturels de la ville. On a tendance à l'oublier, mais s'immerger, même quelques instants, dans la nature, offre de belles pauses méditatives. Quand l'esprit sature, quand tout semble aller contre vous, marcher, respirer et observer peut faire le plus grand bien.
À l’inverse, se retrouver au pied des grands bâtiments provoque une sensation des plus étrange. Ces constructions, évoquant le capitalisme et des ego bien sur-dimensionnés, ont de quoi donner le vertige. Pour cela, pas besoin de monter dans la Tour CN. On se sent rapidement tout petit, oppressé, même lors de simples promenades le long des larges avenues. Le bruit, omniprésent, n'aide pas à permettre de se sentir bien au milieu de cet univers.
L'atmosphère y est également beaucoup plus froide. Les passants semblent encore plus renfermés que dans les rues parisiennes. Chacun suit son chemin, pressé par le temps. Rares sont ceux qui s'arrêtent pour regarder autour. On l'oublierait peut-être, mais Toronto est avant tout une ville business. Il ne faudrait pas perdre la moindre précieuse seconde.
Heureusement, dès que l'on s'éloigne un peu du centre, les gens sont plus accueillants. Plus visible, la nature y est plus réconfortante.
D'où l'intérêt de reboiser nos villes. D'où la nécessité de protéger tous les êtres vivants, et de prendre bien soin de ces oasis vertes. La nature nous aide et nous apporte beaucoup, il est maintenant temps de nous retourner vers elle.
Si la nature est plus apparente au Canada, cela ne veut pas dire qu'elle est mieux prise en charge. Mais de cela, il en sera question dans un prochain épisode.
-Dorian Vidal