Quand il a reçu le ballon, à quelques secondes de la fin du troisième quart-temps, il n’avait que ça a l’esprit. Toute la salle y pensait, l’espérait. Mais plus rien ne pouvait le distraire. Dans sa tête, il fit le vide. Plus un bruit. La salle plongée dans l’obscurité. Trois dribbles, il lève les yeux vers la seule source de lumière possible à ce moment, le panier. Face à lui, son défenseur disparaît. Il prend ses appuis, s’envole délicatement, et laisse la balle lui glisser des doigts, en réalisant un parfait fadeaway. Il n’a pas le temps de cligner les yeux que splash…
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En un instant, le bruit revient, plus fort que jamais. À peine le ballon traverse l’arceau, que toute la salle s’enflamme, et LeBron James peine à réaliser l’exploit qu’il vient d’accomplir. «a shot in history… and there it is!» À 38 ans, l’athlète devient le meilleur marqueur de l’histoire de la NBA, avec 38 390 points à la fin du match.
À son arrivée dans le Staples Center (ici on ne prononcera pas le nouveau nom commercial de l’arène, désolé), James apparaissait déjà motivé. Tout de noir vêtu, sa détermination ne passait plus inaperçue. Il ne lui manquait plus que 36 points pour battre le record, ce qui peut sembler beaucoup, mais pas pour LeBron. Il était peut-être déçu du choix des Nets de Brooklyn, de ne pas avoir envoyé Kyrie Irving le rejoindre à Los Angeles, mais le King n’allait pas laisser cet événement gâcher sa soirée. S’il y a bien un élément qui caractérise la personnalité de James, c’est sans doute sa détermination, et sa motivation sans failles.
Il en a fallu de la force, pour apporter à Cleveland un premier sacre, surtout en étant mené 3-1 par les Warriors de Stephen Curry. Il en a fallu de l’abnégation, pour ramener les Lakers au sommet de la NBA, dans la «bulle» de Disney World à Orlando, Floride (COVID oblige), dix-septième sacre de la franchise, et premier après un certain Kobe Bryant. On aurait d’ailleurs aimé que Kobe soit dans la salle ce mardi 7 février 2023, pour voir LeBron imiter ce geste qu’il maîtrisait si bien, mais la vie en a malheureusement décidé autrement.
Dans les tribunes ce soir-là, il y avait du beau monde. Des anciens coéquipiers, ses fils et sa famille, mais aussi du grand, et du très très grand, en la personne de Kareem Abdul-Jabbar, et ses 38 887 points en carrière. Si The Captain était dans la salle, c’était bien pour encourager LeBron, et pour le féliciter, parce que c’est ça, la beauté du sport. Lui qui a été six fois champion NBA, six fois meilleur joueur de la saison régulière, entre autres, a sans doute été une grande source d’inspiration pour l’actuelle meilleur joueur de la ligue.
Alors, quand ce tir, désormais historique, a fait trembler les filets, LeBron ne pouvait pas ne pas aller saluer Kareem. Les chants de «MVP, MVP, MVP !» descendaient des tribunes, quand James commençait à peine à mesurer l’ampleur de ce qu’il venait d’accomplir. Très vite entouré par sa famille, et visiblement ému, il se présenta ensuite au public aux côtés du légendaire Kareem Abdul-Jabbar, qui, comme pour une passation de pouvoir, lui transmit son ballon.
Ce record, qui semblait jusque-là inatteignable, est finalement tombé. À 38 ans, et après plus de vingt saisons au plus haut niveau, LeBron James continue d’enchainer les grandes performances. Si bien qu’il est toujours parmi les dix meilleurs marqueurs de cette saison, derrière des «petits jeunes» en comparaison. Et cela n’est pas près de s’arrêter. Il l’a dit lui-même, il ne compte pas mettre un terme à sa carrière de sitôt. Alors, à nous d’en profiter.
Comparaison n’est pas raison, et à vouloir faire des classements en permanence, on perd souvent des yeux la grandeur des événements actuels, et l’ampleur des performances contemporaines. Comme tout, la NBA a beaucoup évolué depuis sa création, et Michael Jordan, Kareem Abdul-Jabbar, et LeBron James, sont tous des excellents et très grands joueurs de basket.
Au buzzer final, les Lakers de Los Angeles se sont inclinés de trois points contre le Thunder d’Oklahoma City. Ce sera sans doute anecdotique aux yeux des livres d’histoire, mais si les Lakers veulent accrocher les playoffs, voire rêver d’un dix-huitième titre, il faudra que l’équipe joue autrement pour les 27 prochains matchs. Un très grand LeBron, aussi fort soit-il, ne peut rien seul.
La question est alors la suivante : jusque où ira-t-il ? Atteindra-t-il les 40 000 points ? Tout semble possible…
Quoi qu’il en soit, LeBron James est une très bonne raison d’aimer le basket. Et il n’est pas la seule, loin de là. Avec les changements apportés par la dernière “trade deadline”, rien n’est plus sûr concernant la conclusion de cette 74e saison de NBA. Que ce soit avec lui, ou avec d’autres grands talents, comme Stephen Curry, Luka Doncic, ou le grand espoir français Victor Wembanyama qui les rejoindra dès cet été, le basket-ball en général a encore de très beaux jours devant lui.
-Dorian Vidal